« J’ai toujours été dans l’observation », lâche-t-il, même si la révélation surprend peu. « Très tôt j’ai acheté un appareil photo. J’avais un cyclomoteur, je partais voir des paysans autour de Brest et je faisais des portraits que je développais moi-même ». Il y a un labo photo au lycée, c’est une chance, il en profite. « J’avais deux passions, la mer et la photo, avec la certitude que je voulais vivre de l’une ou de l’autre ». Il précise, « j’aurais bien aimé être chercheur à Ifremer, mais il aurait fallu que je fasse un bac C ». La recherche maritime est néanmoins dans sa ligne de mire, alors il s’inscrit en fac de biologie. Il y reste trois mois « j’étais agoraphobe et il y avait beaucoup trop de monde dans les amphis ». Ce sera donc la photo. Il dévore frénétiquement tous les ouvrages qui lui sont consacrés à la bibliothèque de Brest. « À la fin de l’année, j’ai passé le concours de l’École Louis Lumière et j’ai été reçu ». Il rigole, « nous n’étions que vingt-cinq dans la classe ».
Il est fasciné par les grands portraitistes comme Richard Avedon, Irving Penn et Bill Brandt « c’est pour ça que je suis allé vers du studio ». Un dispositif plutôt lourd, « tout le contraire de Cartier Bresson », sourit-il, pour mettre le sujet en valeur. « Mes premiers boulots, c’était des travaux extrêmement léchés, avec des gens grimés et mis en scène pour de la publicité ». Il est à Paris et travaille énormément. Un jour de 1987, un automobiliste le percute alors qu’il roule en scooter. « J’ai eu une hémorragie dans le cerveau qui a occasionné une perte de la parole ».
Un choc qui remet beaucoup de choses en question. « J’ai réfléchi à ce que je voulais faire. Quelle était la vraie raison pour laquelle je voulais être photographe ? ». Il part se reconstruire à New York et se met à faire des photos de rue. Il dit « mon accident m’a donné une plateforme de sérénité. Ça aurait pu me ralentir, ça m’a accéléré. Comme si j’avais été en résidence mentale pendant deux ans ». En rentrant à Paris il se met à travailler pour la presse féminine, « cela m’a amené à aller chercher la beauté des gens ». Aujourd’hui, il a rejoint ses bases brestoises, mais continue à aller un peu partout, au gré des commandes, attraper la beauté des gens pour la fixer sur photographie.
Mes images
« New York. C’est une ville très internationale et festive que j’aime photographier. Si je n’avais pas eu d’enfants, je serais retourné y vivre aujourd’hui. Je n’aurai pas de retraite, je n’arrêterai jamais et je sais que cette ville peut me nourrir indéfiniment ».
« En dehors de mon travail de commande, je continue à épurer sur du travail de studio. Le fond blanc, tu as toute la liberté. C’est une quête qui ne sera jamais finie ».
« Je recherche une esthétique, je ne suis jamais dans la destruction. C’est souvent dans la lumière que ça se joue. La plus belle lumière, c’est la plus simple ».
Mes sons
« J’écoutais de la musique des années soixante-dix et je suis entré dans la musique contemporaine. Depuis cinq ans, je suis président de l’association de l’Ensemble Sillages à Brest. Cela m’a ouvert à d’autres sons. J’apprends à apprécier la dissonance. En ce moment, nous travaillons avec le compositeur portugais Martin Matalon que j’apprécie vraiment. Côtoyer ces artistes m’a appris à les comprendre ».
« J’aime beaucoup la musique répétitive. Steve Reich, Philip Glass, Luc Ferrari ».
Mes textes
« Ma grand-mère était une paysanne déplacée dans la ville. Elle portait la coiffe. Mon grand-père était charron, il fabriquait des charrettes, il était venu à Brest pour travailler à l’arsenal. Tous deux étaient en sabots. Quand j’étais môme, j’allais lire Le cheval d’orgueil de Pierre-Jakez Hélias avec ma grand-mère, c’est un souvenir très fort ».
« J’adore Marguerite Duras, parce qu’elle a une écriture très cinématographique et photographique. Peter Hanke aussi ».
Le site de Didier.